Le financement de la force G5 Sahel assuré, mais pour un an ..


Enthousiasme européen, prudente satisfaction africaine : le résultat de la conférence internationale de Bruxelles, vendredi 23 février, pour financer notamment la force militaire du G5 Sahel a sans doute dépassé les espoirs de ses organisateurs, mais certains dirigeants n’ont pas caché leur crainte que l’effort consenti ne soit pas « durable ». Or, « ce que nous faisons pour la lutte contre le terrorisme est aussi destiné à assurer la sécurité mondiale », soulignait par exemple, Mahamadou Issoufou, président du Niger et du G5 Sahel, le groupe créé en 2014 pour renforcer la coopération, notamment dans le domaine de la sécurité, entre le Burkina Faso, le Mali, la Mauritanie, le Niger et le Tchad.

Le résultat positif — et un peu inattendu — de la réunion est que la force militaire conjointe des cinq pays devrait voir ses coûts de fonctionnement presque intégralement couverts : ils sont estimés à 423 millions d’euros pour 2019, et 410 millions d’euros de promesses de don ont été enregistrés. Censée compter 5 000 hommes et agir notamment dans les zones frontalières — où elle a déjà mené deux opérations —, la force pourra se mobiliser vraiment au printemps, alors que les attaques de groupes djihadistes se multiplient, visant notamment les soldats français de l’opération « Barkhane ». Deux d’entre eux ont été tués au Mali mercredi, portant à douze le nombre de militaires tués depuis 2014.

Pas de « stratégie de sortie »

« Barkhane », qui compte 4 000 hommes, doit être appuyée et, à terme, relayée par la force régionale. A ce stade, il n’y a toutefois pas de « stratégie de sortie » prévue, a cependant dit Emmanuel Macron, soulignant que l’effort financier pour la force G5 ne visait pas à hâter le départ de l’armée française.

L’effort financier consenti par les soixante délégations présentes est « très encourageant », a expliqué Moussa Faki, président de la commission de l’Union africaine. Il reste, cependant, à concrétiser les promesses, insistait-il, rappelant que la zone à sécuriser compte 28 000 km de frontières et s’étend sur 5 millions de km². Pour l’instant, 50 millions d’euros seulement, ceux promis dans un premier temps par l’UE, ont été effectivement débloqués. Afin de pérenniser le financement de la force, les dirigeants du Sahel tentent de la placer sous l’égide de l’ONU, ce qui permettrait de lui assurer durablement des ressources.

M. Issoufou a rappelé, en tout cas, qu’il faudra encore mobiliser 115 millions d’euros annuellement pour des opérations qui risquent de durer longtemps. « Les plus grandes armées du monde ont combattu Daech durant trois ans en Irak et en Syrie », rappelait-il, en soulignant que la déstabilisation de la Libye après l’opération militaire occidentale avait aussi largement contribué à aggraver la situation sécuritaire de toute la région, en permettant notamment aux réseaux terroristes et criminels de s’approvisionner massivement en armes.

Terrorisme et migration

En réponse, la haute représentante de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, Federica Mogherini, convenait que seul un soutien réel et effectif aux pays de la région permettrait de répondre aux deux préoccupations majeures des Européens : le terrorisme et la migration. Mais elle estime que le message lancé vendredi est « très clair, très fort, très puissant ». D’autant que l’UE et ses membres restent les premiers donateurs de la région sahélienne, avec 8 milliards d’euros d’aides au développement pour la période 2014-2020, montant augmenté de 243 millions d’euros d’aide humanitaire en 2017.

Sur les 414 millions d’euros annoncés vendredi, l’UE contribuera à hauteur de 100 millions. L’Arabie saoudite a promis 100 autres millions, les Emirats arabes unis, 30, les Etats du G5, 50. La France complétera son effort à hauteur de 8 millions, essentiellement sous forme de matériel. Les Etats-Unis ont, eux, promis l’équivalent de 48,8 millions d’euros d’aide bilatérale.

Quelque cinq cents projets de développement, chiffrés à 6 milliards d’euros pour la période 2018-2022 et destinés aux zones les plus fragiles, ont aussi été présentés. La France évoque un premier projet de 10 millions d’euros axé sur l’éducation et l’insertion professionnelle dans le centre du Mali. Elle devrait également s’engager à augmenter de 40 % ses versements à des projets de développement d’ici à 2024, à hauteur de 1,2 milliard d’euros.

Pour le reste, les futures discussions sur le budget européen montreront si le partenariat avec l’Afrique reste réellement une priorité commune des Vingt-Sept.